"Le dualisme et un contre-courant dans
l'infraction de commission intentionnelle"
 

par Me François Lareau, 1989, rev. et corr. pour la forme seulement, août 2001

    «[...] sans doute radical, il n'a pas de  philosophie veritable.» (Karl Jaspers1)
 

TABLE DES MATIÈRES

Introduction

I- THÉORIE AUSTINIENNE DE L'ACTE

A- Exposé de la théorie
B- Critique de la théorie
C- Problèmes juridiques découlant d'une vue austinienne de l'acte

II- THÉORIE FINALISTE DE L'ACTE

A- Exposé de la théorie et répercussions juridiques
B- Aspects philosophiques de la théorie

Conclusion

Notes
 

Introduction

           Si on demandait à un avocat2 canadien qui n'a pas pratiqué le droit pénal depuis une vingtaine d'années, d'énumérer les conditions de la responsabilité pénale, celui-ci répondrait sans doute après quelques moments d'hésitation, qu'il faut un actus reus et une mens rea et peut-être ajouterait-il, s'il est brillant ou s'il a une bonne mémoire, qu'il faut en plus l'absence d'un moyen de défense comme la contrainte par menaces3.   Si on lui demandait en plus ce qu'il entend par ces mots latins, sa tâche serait rendue plus difficile et peut-être répondrait-il que l'actus reus signifie «l'acte illicite»4 d'un crime et la mens rea, «état d'esprit, intention coupable»5.  Ce même avocat serait sans doute surpris de se voir rappeler que ces deux locutions latines ne viennent pas de deux phrases distinctes mais d'une seule, «actus non facit reum, nisi mens rea sit rea», soit qu'«un acte ne rend pas une personne coupable à moins que son intention ne soit coupable»6.  Cet avocat serait également étonné d'apprendre que la notion d'actus reus n'est apparu dans la doctrine anglaise que vers 19267.
 

           À vrai dire, la théorie pénale n a pas beaucoup changé.  Dernièrement, le juge McIntyre nous disait dans l'arrêt R. c. Tutton8 que : «Dans les affaires criminelles, en général, c'est l'acte joint à l'état d'esprit ou à l'intention qui est puni.»   Si on demandait à un citoyen qui n'est pas un avocat d'expliquer ce que le juge Mcintyre a dit, il dirait sans doute que celui-ci a voulu dire que: «Dans les affaires criminelles, en général, c'est  l'action intentionnelle qui est punie".  Le citoyen  n'aurait pas tort et serait sans doute mieux compris de tous.
 

           Prenons un autre exemple de la «catéchèse» de droit pénal du juge McIntyre dans ce même arrêt.  Celui-ci écrit  : «Notre concept de culpabilité criminelle repose principalement sur l'examen de l'état d'esprit qui accompagne l'acte délictueux ou lui donne naissance [...]»9.  Si on demandait toujours à ce même citoyen d'expliquer ce que juge McIntyre a dit, celui-ci, en plus d'être quelque peu fatigué de déchiffrer notre langage juridique et son propre droit, serait sans doute incapable de le faire, car il ne pourrait concevoir avec son bagage d expérience qu'un état d'esprit comme l'intention puisse «accompagner» l'acte.  On ne pourrait reprocher à ce citoyen son ignorance, si ignorance, il y a.  Pour soutenir la position du citoyen, on pourrait citer le philosophe Ludwig Wittgenstein qui a dit :  [traduction] «"L'intention avec laquelle une personne agit, ‘n'accompagne' pas plus cette action que la pensée ‘n'accompagne'  la parole»10.  Nous aurons l'occasion dans ce travail, de revenir à Wittgenstein, philosophe anglais d'origine autrichienne qui prôna que la philosophie devait consister «dans l'activité de clarification d'une pensée qui entend se dégager des  pièges du langage»11.
 

           Parfois, les juges se montrent un peu plus ambitieux et dans un élan de raffinement ajoutent un mot encore rempli de mystères juridiques en disant que cet état d'esprit, la mens rea, doit être «blâmable»12.  Les auteurs de doctrine voient deux mens rea distinctes13.  Premièrement, une mens rea qui a un sens descriptif et qui correspond à des états d'esprit ou à des facteurs d'ordre psychologique comme l'intention ou l'insouciance.  Deuxièmement, une mens rea qui a un sens normatif et qui se rapporte à des notions d'ordre moral ou d'éthique tel la faute ou le blâme.  Il me semble préférable de rebaptiser la mens rea descriptive en l'appelant la mens rea  psychologique et la mens rea normative en l'a décrivant comme la mens rea de blâme. En effet, dire que la mens rea dans son sens descriptif est l'intention, c'est à la fois décrire ce qu'est la mens rea et établir une norme juridique14.
 

           Laquelle des deux conceptions de la mens rea devrait prévaloir en droit pénal?   La mens rea  psychologique ou celle du blâme?  Ce sujet est d'un grand intérêt pour le praticien, le théoricien, le juriste et le législateur, suite à la constitutionnalisation de la mens rea15.  L'école qui favorise la mens rea  psychologique pourrait sans doute être appelée l'école classique ou orthodoxe at celle favorisant la mens rea de blâme16, l'école moderne puisque sa manifestation nord-américaine est récente17.  Le principal porte-parole de l'école moderne en Amérique du Nord est George P. Fletcher, professeur à l'Université Columbia.  La théorie de George Fletcher est largement d'influence allemande18.  J'admets mon adhésion à cette école moderne.
 

          Ce qui force les juristes à parler ainsi, d'actus reus, d'élément matériel de l'infraction, et de mens rea psychologique, c'est que notre droit pénal est fondé sur une philosophie qui voit l'homme comme un être composé de deux entités, le corps et l'esprit.  Voici comment la Commission de réforme du droit du Canada explique le fondement philosophique de ce dualisme :
 

Depuis l'époque de Descartes et peut-être même avant celle-ci, les Occidentaux ont, en règle générale, perçu le corps et l'esprit comme deux éléments distincts plutôt que comme deux aspects d'un ensemble. C'est ainsi qu'en droit, nous faisons la distinction entre actus reus et mens rea19.


         Mettre tout le blâme du dualisme sur les épaules de Descartes est  peut-être injustifié ou exagéré et on aurait peut-être du citer John Locke à la place20.   Quoi qu' il en soit, selon cette philosophie classique, le corps et l'esprit sont deux entités distinctes mais en interaction : les événements qui proviennent du corps, les actes, sont causés et expliqués par des événements qui se déroulent dans l'esprit21, soient la volonté ou plus précisément, comme nous le verrons avec Austin, les volitions, les actes de la volonté.
 

         Ce qui caractérise cette analyse dualiste de l'homme, c'est que d'un côté, tout ce qui relève du corps est externe, appartenant au domaine public et de l'observable.  De l'autre côté, tout ce qui relève de l esprit est au contraire interne, du domaine privé de l'homme et fait significatif, non-observable directement22.  Nous pouvons cependant découvrir ces états d esprit en faisant des déductions de ces actes.  Nous connaissons tous cette présomption non-impérative et de bon sens en droit pénal à l'effet qu'une personne veuille les conséquences probables de ses actes.  Puisque l'épistémologie est l'étude des méthodes de connaissance, il est juste de qualifier cette forme de connaissance qui provient de l'observable de [traduction] «dualisme épistémoligique»23.  Comme nous le verrons dans cet article, on pourrait même qualifier cette forme de connaissance de «causalité épistémologique». Ainsi pour le juriste anglais Blackstone du XVIIIe siècle, un crime requiert-il la volonté (l'intention) et un acte mais [traduction] «un tribunal temporel ne peut [...] sonder les intentions de l'esprit autrement que par la démonstration de celles-ci dans les actions extérieures [...]»24.
 

           La jurisprudence nous indique également que l'actus reus ou l'acte doit être volontaire.  En effet, le juge Dickson nous dit dans l'arrêt Perka25, un arrêt riche en philosophie, en théorie,  et qui traite de la défense de l'état de nécessité :
 

[...] les actes qui constituent l'actus reus d'une infraction doivent être volontaires.  Littéralement, cette exigence de caractère volontaire signifie simplement que les actes matériels interdits doivent avoir été accomplis sous le contrôle conscient de leur auteur.   Sans ce contrôle, il n'y a pas d'acte pour les fins du droit criminel.


           Ce «contrôle conscient» se rapporte encore à quelque chose qui se passe dans la «tête» de l'agent.  C'est une «condition de punissabilité»26 ou une exigence de l'infraction touchant l'acte.  Ce «contrôle conscient» exige, par exemple, que l'acte ne soit pas le résultat d'un somnembulisme ou de certaines formes d'automatisme.  Cette exigence27 de l'acte, nous vient de la philosophie de droit de John Austin et plus particulièrement, de sa théorie de l'acte28.  Cette théorie austinienne de l'acte constitue un raffinement de la philosophie classique du dualisme, raffinement qui trouve son origine dans la méthodologie des sciences naturelles qui prévalait à l'époque d'Austin.  Certains philosophes du droit voient dans cette exigence une confusion entre le dualisme distinct qui existait avant entre l'acte et l'intention29.  Cependant, il est plus juste de voir dans la théorie de l'acte volontaire, un dualisme30, entre l'acte et les volitions.  On pourrait même parler d'un double dualisme comme nous le verrons plus loin.
 

           Comme l'indique le titre de ce travail, on doit interpréter cet article dans un contexte d'infractions de commission intentionnelle, c'est-à-dire des infractions d'action dite positive commises intentionnellement.  De plus, la notion d intention doit être interprétée dans son sens large comme comprenant l'insouciance31.   Les infractions de commission par négligence et les infractions d'omission qui, elles, peuvent être soient intentionnelles ou par négligence, se distinguent à plusieurs égards des infractions de commission intentionnelle qui sont les infractions de base en droit pénal32.   Les amants de la généralisation me reprocheront sans doute de ne pas couvrir tout le droit pénal, mais vouloir tout généraliser revient souvent à dire des platitudes33!   Pour le sceptique, affirmons que le but de cet article n'est pas de nier pour l'infraction de commission intentionnelle, que la Couronne (poursuite) doit prouver l'action intentionnelle illicite (ou pour le dualiste, l'acte et l'intention); ou encore, que l'accusé, affligé d'automatisrne, ne devrait pas être acquitté.  L'article aurait bien pu être intitulé «Intention et conceptions du langage» ou encore «Intention et conceptions de l'homme».   Le titre choisit représente cependant un attrait visuel plus important pour le théoricien qui s'intéresse au droit pénal.
 

          Je souhaite par cet article amener le lecteur à questionner le bien-fondé de la position dualiste, soit  que l'intention «accompagne» l'acte.  Deuxièmement, j'essaierai de convaincre que:  l'intention se trouve dans l'acte; l'acte et l'intention ne font qu'un; l'acte n'a de sens qu'avec l'intention; la mens rea  psychologique se trouve dans l'actus reus et que ces deux notions ne constituent pas deux conditions distinctes de punissabilité mais une seule.  Le théoricien qui verra la mens rea psychologique dans l'actus reus recherchera le sens véritable de la mens rea constitutionnelle qui,  libérée de ses chaînes la liant à une notion d'état d'esprit, l'amènera vers un concept de blâme.  Cette notion de blâme restera à préciser et à développer suite à l'arrêt Perka où le juge Dickson a expliqué le fondement des excuses33a.
 

         Le seul moyen d'arriver à mes fins est de questionner la dichotomie entre l'acte et l'esprit.  En effet, la mens rea psychologique ne peut subsister comme condition de punissabilité distincte que si elle est séparée de l'actus reus.  La philosophic du droit pénal, comme toute philosophie, permet de questionner ces notions fondamentales de l'orthodoxie.  Nous nous demanderons si notre dualisme épistémologique en droit pénal ne devrait pas laisser un peu de place à d'autres méthodes de connaissance provenant du fait que l'homme vie dans une société et que notre pratique langagière courante contient une richesse de connaissance et d'expérience que notre droit pénal semble totalement ignorer.  L'action intentionnelle (l'acte et l'intention pour le dualiste) devrait être conçue comme le non-juriste la conçoit, c'est-à-dire simplement.  L'action intentionnelle existe quand l'observateur peut donner un sens à des actes et conclure par le langage que l'agent a fait quelque chose intentionnellement, exemple «tuer».
 

          Puisque la théorie austinienne de l'acte est plus que représentative du dualisme, je l'ai choisie comme victime. La première partie de cet article sera consacrée à exposer cette théorie de l'acte (et de l'intention puisque l'un ne va pas sans l'autre) de John Austin et à présenter une critique de celle-ci.  Cette critique, nous révélera que la théorie austinienne de l'acte ne concorde pas avec la réalité que nous révèle le langage.  L'épistémologie juridique qu'elle sous-entend est la causalité et  celle qu'on oublie est l'intersubjectivité entre les individus.  Enfin, nous donnerons deux illustrations des difficultés juridiques que soulèvent une vue étroite de l'acte à la manière austinienne.
 

           Nous consacrerons la deuxième partie de notre article à la théorie finaliste de l'acte.  Nous verrons dans un premier temps que cette théorie a été développée par le juriste et philosophe allemand Hans Welzel et par son école.  Selon cette théorie, l'intention ne peut être dissociée de l'acte et chaque être humain a un but en agissant.   De cette théorie découle la constatation juridique importante que l'intention, la mens rea  psychologique, se trouve dans l'acte, dans l'actus reus.  Cette théorie est à l'origine de grands changements dans la théorie pénale allemande surtout en cequi a trait au sens à donner à la mens rea allemande («Schuldhaftigqkeit»).  Nous réaliserons que cette théorie de l'acte correspond à celle de la pratique langagière courante.  Dans un deuxième temps, nous examinerons quelques aspects philosophiques et plus particulièrement, avec l'aide de Fletcher, comment cette théorie rejoint en quelque sorte le message philosophique de Wittgenstein.   Le lecteur reconnaîtra sans doute un contraste philosophique important entre les deux théories exposées.
 
 

I- THÉORIE AUSTINIENNE DE L'ACTE

A- Exposé de la théorie

          Avant d'aborder la théorie d'Austin qui a toutes les allures d'une théorie scientifique, il serait utile pour comprendre cet auteur et pour les fins de notre discussion,  de poser au lecteur quelques questions à partir d'un exemple fictif.   A active une bombe à retardement et la place sous le lit de B afin de tuer celui-ci  lors de son retour prévu dans quelques heures.  B revient tel que prévu, la bombe explose et tue B.  L'explosion et la mort de B font-elles parties des actes de A?   Les actes de A se limitent-t-ils aux mouvements physiques que cette personne a effectués?  Voilà bien le genre de question qui intéresse la philosophie anglaise depuis plus de 30 ans34.  Cette philosophie des pays anglo-saxons se fascine surtout pour la structure du langage et la logique35.
 

           On dit36 que John Austin (l790-1859) est après Bentham, l'auteur anglais le plus influent dans le domaine de la «jurisprudence».  La «jurisprudence», c'est le «domaine de la théorie du droit anglaise»37.  Austin développa la «jurisprudence» analytique, soit  «une théorie de droit positif en général [...] une étude des concepts juridiques abstraits des différents systèmes positifs [...]».38.
 

            Disons brièvement quelques mots sur les faits marquants de la vie de John Austin39.   Il  fut professeur à l'Université de Londres à une époque où l'on commençait à enseigner le droit à cette université.  Austin séjourna à deux reprises en Allemagne (il fut influencé par le droit allemand).  Il connut de son vivant Bentham, James Mill et John Stuart Mill.
 

           La théorie de John Austin sur l'acte et l'intention se retrouve dans ses Lectures on Jurisprudence or the Philosophy of Positive Law (1869) et plus particulièrement dans deux de ses «lectures» (cours)40.   Les nombreux exemples de Austin ne font pas expressément mention du droit pénal, mais il ne fait aucun doute qu'Austin avait en tête ce droit lorsqu'il écrivait sur l'acte et de l intention41.  Ajoutons, que Austin fut de 1833 à 1836, membre de la Commission royale qui révisait  le droit pénal anglais41a.
 

           Pour Austin, les actes consistent en des mouvements du corps ou des contractions musculaires.  L'acte est la conséquence du désir pour cet acte. Il  appelle ce désir, la volition42 :

[Traduction] Certains mouvements de nos corps suivent invariablement et immédiatement nos désirs ou nos souhaits pour ceux-ci [...].

Ces souhaits qui précèdent et ces mouvements qui leurs sont conséquents sont les volitions et les actes (au sens propre et précis).  Ils sont les seuls objets pour lesquels ces mots s'appliquent d'une façon propre et précise.

 [...]

 [...] Un mouvement volontaire de mon corps ou un mouvement qui suit une volition est un acte43.

           Austin nie l'existence de la «volonté» comme entité ou pouvoir distinct des volitions :
 
[Traduction] Mais à part de ce désir antécédent (et que j'appelle la volition), et du mouvement conséquent (que j'appelle l'acte), on suppose communément qu'il y a une certaine «volonté» qui est la cause ou l'auteur des deux  [...].

Que cette volonté n'est rien du tout a été démontré [...] par feu le Docteur Brown qui a aussi banni du domaine des entités, ces créatures imaginaires que nous appellons "pouvoirs" et dont cet imaginaire "volonté" en est une [...] il fut le premier (je crois) à comprendre ce que l'on veut dire, lorsqu'on parle de la Volonté et du pouvoir ou la faculté de vouloir.

 Tout ce que je peux découvrir quand je veux un mouvement de mon corps par un acte de la volonté se résume à ceci : je souhaite le mouvement.   Le mouvement suit immédiatement mon souhait pour celui-ci44.


          Selon Austin, tout acte est suivi de conséquences et tout acte comporte aussi des circonstances.  Une conséquence d'un acte ne peut être l'objet des volitions car seuls les actes, c'est-à-dire les mouvements du corps le sont.  Prévoir une conséquence est du domaine exclusif de l'intention bien que les mouvements du corps qui sont l'objet des volitions sont aussi intentionnels45.
 

          Pour revenir à l'exemple de notre bombe, Austin aurait dit que l'explosion et la mort de B étaient des conséquences et que les seuls actes de A, étaient, par exemple, d'activer la bombe et de la placer sous le lit.  Voilà bien la façon restreinte et diminutive de définir l'acte et, j'ajouterais, l'action humaine.  Réalisons la nette distinction entre l'acte qui résulte des volitions et la conséquence de l'acte.  Cette conséquence peut être intentionnelle et donc du domaine de l'intention.  Ne peut-on pas avancer une notion de double dualisme dans la théorie austinienne: le premier entre les volitions et l'acte et,  le deuxième, entre l'intention et sa conséquence.
 

         Austin était bien conscient que cette façon de décrire l'acte (et l'action) ne correspondait pas à la pratique langagière courante.  Il expliquait la faute du parler par sa façon abrégée d'exprimer «l'objet de nos discours» :

 
[Traduction] La seule difficulté qui entoure le sujet vient de la façon concise ou abrégée avec laquelle, en général, nous exprimons les objets de nos discours.

La plupart des noms qui semblent être des noms d'actes, sont des noms d'actes, accouplés avec leurs conséquences.  Par exemple, si je vous tue avec un fusil ou un pistolet, je vous tire: et la longue suite d'événements qui sont dénotés par cette brève expression, sont considérés ou discutés comme s'ils constituaient un acte accomplit par moi.  En fait, les seules parties de cette succession d'événements qui sont mon acte ou actes, sont les mouvements musculaires avec lesquels je lève l'arme et tire sur la gâchette. Ceux-ci je les veux.  Le contact de la pierre à fusil avec l'acier, l'inflammation de la poudre et la course de la balle vers votre corps, la blessure et la mort qui suivent ainsi que les nombreux incidents qui sont inclus dans ceux-ci sont les conséquences de l'acte volontaire.  Ces conséquences ne résultent pas des volitions bien qu'il se peut qu'elles soient intentionnelles46.


          Aux États-Unis, Oliver Wendel Holmes adopta47 en grande partie cette théorie austinienne de l'acte pour [traduction] "analyser la structure du crime et le délit civil [le "tort"]»48.  Tout le droit anglo-saxon a été influencé par la théorie austinienne de l'acte.
 
 

B- Critique de La théorie
 

          La philosophic d'Austin se limite au droit positif, comme le démontre le titre de son livre: Lectures on Jurisprudence or the Philiosophy of Positive Law.  Comme l'explique Fasso, sa «jurisprudence», théorie de droit positif et une orientation du positivisme juridique, «se veut [une] organisation autonome et rationnelle du droit positif, abstraction faite de tout contenu d'éthique et de tout présupposé historique ou sociologique de ce dernier»49.   En faisant ces éliminations, le droit devient «objet d'une science autonome»50.  Dans un autre livre d'Austin, The Province of Jurisprudence Determined51, celui-ci distingue trois sciences: la science de la «jurisprudence», la science de la moralité positive et la science de l'éthique52.
 

          Avec son cours sur l'acte humain, je soumets qu'Austin a adopté la méthode de l'analyse dite de la réduction, méthode propre à Hume et à l'empirisme et qui consiste à réduire [Traduction] «un tout à ses parties, le complexe à ses éléments primitifs et simples»53.  Ainsi l'action humaine (ou l'acte humain) est-elle réduite à son plus simple, le mouvement corporel causé par des volitions.
 

          On peut légitimement se poser les questions suivantes : l'analyse quelque peu scientifique de l'acte humain par Austin est-elle appropriée au droit pénal?  Peut-on réduire l'acte et l'action humaine à des mouvements du corps causés par des volitions?
 

          Avant d'aborder la critique émise par quelques philosophes et théoriciens du droit à cette théorie, soulignons que celle-ci ne correspond plus à la réalité scientifique de la psychologie et de la physiologie54.
 

          H.L.A. Hart dans son livre Punishment and Responsibility55 critique la théorie austinienne pour deux raisons.  La première objection de Hart concerne l'application de cette théorie aux omissions.  Cependant, puisque le sujet de ce travail ne concerne que les infractions de commission intentionnelle, nous sauterons cette critique56.
 

          La deuxième objection de Hart est que cette théorie austinienne  représente une [Traduction] «fiction démodée, une oeuvre sur la psychologie du dix-huitième siècle qui n'a aucune application réelle à l'action humaine»57.  Hart indique que des expressions comme «volitions» ou «actes de la volonté», sont rarement utilisées dans le vocabulaire des juges et des gens ordinaires58.  Selon Hart, la façon austinienne de  voir l'action, le désir pour l'acte physique, suivit de l'acte physique et la conséquence, ne correspond pas à l'expérience de l'homme ordinaire, ni à sa façon de concevoir ses propres actions59.
 

         Pour Hart, dire que l'acte comprend le désir pour des contractions musculaires est une fiction car le désir arrive rarement dans les activités de tous les jours60.  Pour démontrer la fiction, Hart mentionne que c'est seulement dans certaines situations précises, qu il est juste de décrire notre acte ainsi61.  Hart donne l'exemple où nous sommes au gymnase et que l'instructeur nous demande de lever le bras et de contracter nos muscles de l'avant-bras.  Il serait juste dans une telle situation, si quelqu'un nous demandait ce que nous avons fait, de dire que nous avons contracté nos muscles62.  Le point important que Hart soulève avec cet exemple est que [Traduction] «le langage ici indique d'une façon pratique, une distinction vitale, fondée sur des faits que la théorie que nous critiquons ignore»63.  Hart explique que  lorsque nous pensons à des actions, nous ne pensons pas avec un langage qui se rapporte à des mouvements corporels mais avec des mots ordinaires d'action (par exemple, frapper quelqu'un)64.
 

          La conception que Hart a de l'action ressemble à celle de la théorie finaliste de l'action que nous verrons plus loin:
 

[Traduction] Ce qui arrive dans l'action ordinaire est que si nous décidons de faire quelque chose, nous pensons à cela avec des mots ordinaires d'action (comme frapper quelqu'un ou écrire quelque chose) et étant donné que nous avons appris à faire ces choses, et que nos facultés ne sont pas affaiblies, nos mouvements musculaires suivent sans difficulté notre décision65.


         La définition de Hart se rapporte à une action physique (comme dessiner) par opposition à une action qui comporte des conséquences qui sont entièrement détachées de l'acte physique (par exemple briser une vitre en lançant une roche).  Nous pourrions reformuler la pensée de Hart en affirmant que toute action qui ne comprend pas de conséquences comprend une décision, un but, une intention (frapper quelqu'un par exemple) et qu'avec l'expérience acquise, nous nous exécutons.   Hart ne s'est pas attardé à l'action humaine qui produit des conséquences qui sont entièrement détachées de l'acte physique car il était préoccupé avec la théorie d'Austin qui limite l'acte au mouvement corporel.   Hart traite des conséquences de l'action dans son chapitre sur l'intention et les peines mais il ne développe pas une définition de l'action intentionnelle66.
 

         Hyman Gross est un autre philosophe qui dans son livre A Theory of Criminal Justice67 a critiqué la conception austinienne de l'acte et son école   Si Gross ne mentionne pas une seule fois le nom de John Austin, il vise Austin et son école puisqu il se réfère à la position orthodoxe.
 

          Selon Gross,  les actes ne sont pas des mouvements corporels et ceux qui décrivent les actes ainsi [traduction] «manquent de jugement et résolvent sommairement par décret un important problème que tous, en y réfléchissant quelque peu, comprenons comme étant un problème difficile et obscur»68.
 

         Pour Gross, les mouvements corporels ne sont pas des actes car [traduction] «ni la survenance et ni le caractère d'un acte criminel ne peuvent être connus en se référant seulement aux mouvements corporels»69.  Dans ce contexte, Gross nous donne des exemples de crimes qui sont définis en utilisant des mots d action comme donner un faux témoignage, usurper l'identité de quelqu un; dans ces situations, il demande au lecteur s'il est possible de conclure qu'un acte de cette sorte a eu lieu seulement en observant les mouvements musculaires70.
 

          On voit bien que l'objection profonde de Gross en est une de langage.  Cependant, celui-ci ne développe pas le dernier point qu'il mentionne et il avoue même dans son livre que [traduction] «l'acte ou l'idée même de l'acte demeure voilée dans le mystère»71.
 

           Quelle conclusion pouvons-nous tirer de la constatation importante de Gross que dans certains cas «ni la survenance et ni le caractère d'un acte criminel ne peuvent être connus en se référant seulement aux mouvements corporels»?  Cette réponse, le professeur Binavince nous l'a donnée en soulignant que [traduction] «le droit criminel n'opère pas seulement dans une réalité matérielle mais aussi dans un monde de concepts et significations»72.
 

          Passons à un autre philosophe, Allan R. White.  Celui-ci  eut comme professeur de philosophie J.L. Austin73.  White nous dit dans son livre Grounds of Liability, An Introduction to the Philosophy of Law74 que la réflexion et le langage, nous permettent de distinguer entre, d'une part, l'acte, et de l'autre,  les circonstances et les résultats de celui-ci75.   Ainsi, on peut distinguer entre A ayant des relations sexuelles avec B et certaines circonstances, par exemple, ces relations sexuelles ont eu lieu sans le consentement de B; ou encore, que C a attaqué D et que comme conséquence, D est mort76.  Cependant, une personne prend souvent en considération dans le langage courant, les circonstances ou conséquences pour caractériser un acte.  Pour continuer avec les mêmes exemples, au lieu de dire que A a eu des relations sexuelles avec B sans son consentement, on peut dire que A a violé B; ou encore, au lieu de dire que C a attaqué D et que comme conséquence, D est mort, on peut dire que C a tué D77.   Selon White, «un acte peut-être décrit dans des termes explicatifs en faisant référence à son but, sa raison ou sa cause [...]»78.  White mentionne qu'Austin a utilisé ces distinctions que la réflexion et le langage nous permettent de faire pour limiter l'acte, les circonstances et les conséquences, et ainsi réduire l'acte à un simple mouvement corporel79.
 

           La Professeur White explique aussi que la réflexion et conséquemment le langage, nous permettent aussi de faire une distinction entre ce que fait une personne, par exemple «je lève son bras», une action, et ce qui arrive «mon bras se lève», un événement; cette distinction n'est pas la différence entre deux faits mais une différence entre un seul et même fait80.  Selon White «Agir, c'est occasionner quelque chose, c'est causer que cette chose arrive.  Mon acte en levant mon bras est de causer que celui-ci se lève»81.  Pour White, cette distinction entre ce que fait une personne et ce qui arrive, est utilisée par Austin pour faire la différence entre un mouvement du corps (ce qui arrive) et un autre mouvement du corps qui est un acte et en reliant ce dernier à une pensée (les volitions)82.
 

           Pour White, le fait de concevoir un acte comme un mouvement du corps ou une contraction musculaire causé par une volition comporte plusieurs difficultés83.  Une de ces difficultés découle de la position d'Austin qui a dit que: [traduction] «Un mouvement volontaire de mon corps ou un mouvement qui suit une volition est un acte»84.  Austin ne fait donc pas de différence entre un acte et un acte volontaire et parler d'acte non-volontaire serait donc une contradiction en soi85.  Le juge Dickson, dans l'arrêt Perka86, évite cette trappe, en disant que lorsqu il n y a pas de contrôle conscient, il n y a pas d acte.
 

           White soulève une autre difficulté, soit de caractériser cette volition87.  À ce propos, White nous réfère à plusieurs philosophes dont Gilbert Ryle, auteur de La notion d'esprit88.  Ce livre est entièrement consacré à démontrer la  fausseté de la doctrine du «fantôme dans la machine»,  le fantôme étant l'esprit et la machine, le corps.  Au sujet des volitions, Ryle voulant démontrer le mythe de ceux-ci, demande au lecteur: «Qui a jamais dit, par exemple, qu'à dix heures [...] il  a émis cinq volitions rapides et aisées et deux volitions lentes et difficiles?»89.  Ryle est un représentant du béhaviorisme, «théorie qui fait consister la psychologie dans l'étude scientifique et expérimentale du comportement (psychologie du comportement), sans recours à l introspection, ni aux explications d'ordre physiologique, ni à la  psychologie profonde»90. Duff compare le béhaviorisme et le dualisme ainsi:
 

[Traduction] Tous deux s'accordent pour dire que ce que l'on observe ce sont nos corps et leurs «comportements neutres» [«colourless behaviour»], c'est-à-dire des mouvements qui peuvent être décrits sans faire mention de concepts comme le dessein ou l'intention.  Ils diffèrent sur la question si nous devrions comprendre ces concepts psychologiques comme se rapportant à des opérations mentales internes et qui doivent être déduites de ces mouvements corporels ou, si d'une manière plus réduite, comme des façons plus complexes de faire référence à ces mouvements corporels eux-mêmes91.


           Le professeur Fletcher apporte la critique la plus importante à notre présente façon de comprendre en droit l'action humaine.  Cette critique s'applique donc à la théorie austinienne.  Selon Fletcher, la perspective dominante est de comprendre les événements humains en mettant l'accent sur la causalité plutôt que sur la connaissance intersubjective92:
 

[Traduction] Parce que nous sommes fortement influencés par la méthodologie des sciences naturelles, nous sommes portés à considérer que nous comprenons les phénomènes en remarquant des relations mécaniques entre cause et effet.  La perspective ainsi négligée est l interdépendance des êtres humains et les modes de connaissance qui nous viennent de cette interaction93.


          Mais quel est le sens à donner à cette «intersubjectivité» dont parle Fletcher?  On pourrait en donner une définition en citant Merleau-Ponty (1908-1961), philosophe français qui s'oppose lui aussi au dualisme.  Celui-ci nous dit: «Une subjectivité révélée [...]  à elle-même et à autrui, est à ce titre [...] une intersubjectivité»94.   Pour Merleau-Ponty, [Traduction] «le corps est une réalité qui est en même temps matérielle et spirituelle95» et qui est [traduction] «en dialogue avec le monde et les autres personnes»96.  Dans son oeuvre philosophique, Merleau-Ponty «tente [...] de décrire, non d expliquer, le réel. S'il critique les tendances réifiantes et mécanistes des sciences (biologie, psychologie), il met aussi en question la notion idéaliste d'une conscience pure, transparente à elle-même»97.
 

          Nous pouvons tirer la conclusion suivante: Fletcher traite de «causalité épistémologique» et avec le «dualisme épistémologique», mentionné dans l'introduction, ces deux expressions décrivent une même forme de connaissance.  Cette conclusion est renforcée par la description que fait le professeur Duff du dualisme:
 

[Traduction] Le dualisme décrit l'interprétation des actions humaines sur le modèle des explications scientifiques des phénomènes empiriques : nous observons un effet et nous faisons des déductions sur les opérations inobservées qui les ont causées98.


           On peut reprocher à notre méthode de connaissance de l'acte, de mettre de côté toute la dimension sociale de l'homme, dimension que nous révéle la sociologie de la connaissance :
 

[Traduction] La réalité de tous les jours [...] Se présente à moi comme un monde intersubjectif, un monde que je partage avec d'autres99.
           Résumons les principales critiques apportés à  la philosophie austinienne de l'acte at au dualisme qui en est la cause.  Cette philosophie s'est divorcée ou égarée du langage ordinaire de l'action, de la façon que les gens comprennent celle-ci.  En plus, cette théorie se fonde principalement sur une connaissance qui relève de la causalité, délaissant ainsi d'autres moyens de connaissance qui nous viennent de notre interaction sociale avec d'autres êtres humains et dont le langage est un exemple.
 

          Le théoricien de droit pénal ne devrait-il pas fonder sa théorie sur une vue plus humaine de l'acte que celle que nous a léguée Austin?   Ne devrait-on pas bâtir une théorie pénale sur une définition de l'acte qui tient compte de la réalité telle que reflétée par la pratique langagière courante qui n'est qu'un exemple de cette intersubjectivité dont parle Fletcther?   Je crois que oui.  Bâtir une théorie pénale sur une conception de l'action qui ne correspond pas à celle de la plupart de ses citoyens, c'est en quelque sorte condamner que nos grands principes de droit pénal restent voilés à tout jamais dans le mystère.  Tout comme on critique les mots techniques du langage juridique (comme mens rea et actus reus) et que l'on déploie des efforts pour transformer ce langage juridique à un langage que tous emploient quotidiennement, ne devrions-nous pas chercher une théorie de l'action humaine qui corresponde plus à la réalité?  La réponse affirmative s'impose.
 

          Pour terminer, constatons quelques difficultés que permet une interprétation austinienne de l'acte,  particulièrement la déduction de l'action humaine à un simple mouvement corporel.
 

c) Problèmes juridiques découlant d'une vue austinienne de l acte
 

         Examinons deux problèmes juridiques.
 

         La première difficulté concerne l'état d'esprit (la mens rea  psychologique) que la Couronne doit prouver pour les crimes qui comportent une conséquence.  Prenons l'exemple de l'infraction d'infliger des lésions corporelles100 qui consiste essentiellement d'infliger des lésions corporelles («causes bodily harm to the complainant») en se livrant à des voies de fait («in comnmitting an assault»).  La définition des "voies de fait" ("assault") la plus utilisée dans la pratique est l'emploi intentionnel de la force contre une personne sans le consentement de cette personne101.   Selon l'école dominante102, il serait suffisant pour la Couronne de prouver : a) l'emploi intentionnel de la force sur la victime sans le consentement de celle-ci (voies de faits); et b) que les conséquences, les lésions corporelles, aient été causées par ces voies de faits sans toutefois exiger une preuve de mens rea  psychologique, l'intention,  quant à ces conséquences (la preuve objective des lésions corporelles et le simple lien de causalité entre les voies de fait et les lésions corporelles étant suffisants).  L'autre école, qui est au stage embryonnaire103, demanderait en plus la preuve de l intention quant aux conséquences.
 

           La position de l'école dominante peut s'expliquer à partir d'une vue austinienne de l'acte qui exclut les conséquences de l'acte.  L'école dominante définit l'acte comme l'emploi intentionnel de la force (l'application de la force dans la version anglaise).  Puisque qu‘il suffit que l'intention «accompagne» l'acte,  l'intention ne s'applique donc qu'au seul acte physique, par exemple le coup de poing, dépourvu de ses conséquences.  Cependant si l'on conçoit l'acte ou l'action intentionnelle, comme une fin que poursuit l'agent, c'est-à-dire l'infliction de lésions corporelles en se livrant à des voies de faits, il est facile de comprendre pourquoi la preuve de l'intention devrait aussi s'appliquer aux conséquences.
 

         Une deuxième difficulté en droit pénal est la distinction entre l'infraction d'intention générale et l'infraction d'intention spécifique lorsque l'intoxication volontaire est considérée.  Le fondement de cette distinction est de saveur austinienne.  Selon le juge McIntyre, dans l'arrêt Bernard104, l'infraction d'intention générale est «celle qui se rapporte uniquement à l'accomplissement de l'acte en question, sans qu'il y ait d'autre intention ou dessein105» (le Juge McIntyre donne l'exemple des voies de fait simples).  L'infraction d'intention spécifique est celle qui «se caractérise par la perpétration de l'actus reus assortie d'une intention ou d'un dessein qui ne se limite pas à l'accomplissement de l'acte en question»106 (le juge McIntyre donne l'exemple de «frapper une personne ou lui administrer du poison avec l'intention de la tuer»107). Cette distinction dans le contexte de ces citations se résume donc  à ceci : l'infraction d'intention générale concerne un acte tel que définit selon la théorie austinienne, un mouvement corporel volontaire (un acte) commis dans certaines circonstances108;  l'infraction d'intention spécifique, elle, concerne un acte tel que définit selon la théorie austinienne mais avec une intention additionnelle expresse («dans l'intention de») pour une conséquence.
 

         Il est maintenant temps d'examiner une théorie de l'acte qui se contraste de celle d'Austin.
 
 

II- THÉORIE FINALISTE DE L'ACTE

A- Exposé de la théorie et répercussions juridiques
 

          Puisque la théorie finaliste de l'acte vient de l'Allernagne, soulignons que la théorie de droit pénal allemande a influencé énormément le développement du droit pénal dans d'autres juridictions (par exemple l'Italie, le Japon et les pays latino-américains)109.  Le droit pénal allemand est riche en idées théoriques et philosophiques.  Les «idées» allemandes dévoilées par le professeur Fletcher dans son livre Rethinking Criminal Law commence a pénétrer la théorie pénale nord-américaine et à influencer nos tribunaux110.
 

          Jusqu'à 1945111, la théorie de l'acte en droit pénal allemand ressemblait à la théorie austinienne112.  Les auteurs appellent cette théorie d'alors, la théorie causale de l'acte113.  Ainsi l'acte de commission apparaît-il pour Listz en 1911, comme le fait de causer volontairement par un mouvement du corps un changement dans le monde extérieur114.  Snyman donne une definition plus générale de cette théorie [Traduction] «[...] l'acte est toute conduite humaine volontaire par laquelle un changement qui peut être perçu par les sens est produit dans le monde extérieur aux moyens des lois mécaniques de la cause et de l'effet»115.  Selon cette théorie, l'intention est non pertinente dans la notion de l'acte116.
 

          Vers 1930117, le Professeur Hans Welzel, philosophe118 et juriste119, commença à développer une théorie nouvelle de l'acte qui eut des conséquences très importantes sur les conditions de punissabilité d'une infraction comme nous le verrons bientôt.  Welzel appela sa théorie finale «handlungslehere» que nous appellerons dans cet article, la théorie finaliste de l'acte120.  Cette théorie est aussi parfois appelée la théorie «philosophique ou ontologique de l'acte»121.  L'essence de cette théorie est que l'acte est téléologique ou dirigée vers un but122.  Fletcher explique cette théorie d'une façon succincte :
 

[Traduction] L'action humaine ne pouvait pas être comprise simplement comme des mouvements du corps, commandés par la volonté, sans percevoir le but de l'action.  L'action humaine, avance Welzel, est intrinsèquement finaliste, pas seulement une manifestation d'un mécanisme interne appelée la volonté [...].
[...]
L'essence de l'argumentation de Welzel [...] est que nous ne pouvons pas comprendre qu'une personne agit à moins que l'on ne comprenne aussi le but que cette personne poursuit [...]123.


           Selon les adhérents de l'école de Welzel,  [Traduction] «le concept de l'acte correspond au concept de l'acte de tous les jours»124.  On retrouve dans la pratique langagière courante une démonstration de ce concept de l'acte.  Il ne faut pas regarder l'acte en parties isolées et détachées sans référence au but de l'agent; c'est le but de l'acte qui lui donne son caractère, son unité particulière et son sens.  Il n y a pas d'acte neutre125.
 

           Prenons l'exemple où l'on voit A mettre une balle dans  un revolver, le pointer vers B qui se trouve à un mètre de lui, presser la gâchette et causer la mort de B.   Dans une telle situation, il serait juste de dire que l'acte de A a été de «tuer» ou «d'assassiner» B et inexact d'affirmer que les seuls actes de A, à la manière austinienne, ont été les mouvements corporels volontaires de mettre une balle dans le revolver, de le pointer vers B et de presser sur la gâchette, et la mort n'étant qu'une conséquence intentionnelle.  C'est le but de A, son intention de tuer B, qui permet d'unifier tous les mouvements corporels, de leur donner un sens et de dire que l'acte de A a été de tuer ou d'assassiner B.
 

          En fait, on pourrait énoncer la théorie de Welzel comme le fait Fletcher, c'est-à-dire que l'acte et l'intention sont indissociables:
 

[Traduction] Nous pourrions énoncer de nouveau la théorie de Welzel, sans doute d'une façon avantageuse, non pas comme une théorie de l'acte, mais comme une théorie de la relation entre l'acte et l'intention.  La proposition que l'acte ne peut être compris lorsqu'il est dissocié de son but implique que l'acte ne devrait pas être séparé de l'intention de l'agent [...].  L'intention et l'acte sont liés ensemble; les deux dimensions d'un même phénomène ne devraient pas être dissociées et traitées séparément [...]126.


           Selon Welzel, «tous les actes sont par définition intentionnels»127.   Cette simple constatation, transposée sur le plan juridique allemand, signifiait que l'intention de l'agent faisait partie de l'actus reus128.  La mens rea  allemande, avant le travail de Welzel,  comprenait des états d'esprit comme l'intention et aussi une notion de blâme129.  Après la théorie de Welzel, il fallait donc redéfinir la mens rea allemande, cette notion de blâme, puisque la théorie finaliste avait retiré l'intention de la notion de mens rea pour la transposer dans la notion d'actus reus.  Welzel avait en quelque sorte sonné le glas pour la stricte dichotomie qui existait en Allemagne (comme chez nous présentement) entre l'acte et l'intention.
 

           D'énormes développements théoriques et des décisions judiciaires importantes130 découlèrent de cette théorie.  Ceux-ci aboutirent aux conditions modernes de punissabilité de l'infraction en droit pénal allemand et à sa notion moderne de mens rea .  Ces conditions de punissabilité131 sont : 1- l'existence des faits constitutifs de l'infraction («Tatbestandsmässigkeit»), faits qui sont prévus dans la loi créant l'infraction (par exemple la loi peut définir le meurtre comme causer intentionnellement la mort d'un autre personne); l'existence de ces faits pouvent être niée, par exemple par une erreur de fait; 2- l'illicéité («rechtswidrigkeit») pouvant être niée par une justification, par exemple la légitime défense; et 3- la culpabilité («schuldhaftigkeit»), c'est-à-dire la faute, le blâme, la mens rea allemande qui est niée dans le cas de l'enfant, de la personne souffrant de troubles psychiques, de celle agissant avec une erreur de droit invincible ou bénéficiant d'une excuse comme l'état de  nécessité132.
 

           Selon la théorie allemande, la condition numéro 1 doit être réalisée avant que la condition 2 ne puisse être considérée et la condition 3 ne peut être considérée que si les conditions 1 et 2 ont été remplies133.   Les conditions 1 et 2 répondent «à la question de savoir à quelles conditions un acte contredit l'ordre juridique»134 et la condition 3 «répond à la question de savoir si l'auteur peut être rendu personnellement responsable de l'acte illicicite»135.   Selon Jescheck, «l'objet du reproche de faute [condition numéro 3] est la défectuosité de la formation de la volonté, qui a conduit à la décision juridiquement désapprouvée»136.
 

          Bien que l'on puisse dire aujourd'hui que la théorie finaliste de l'acte en Allemagne n'a pas réussi à être acceptée par la majorité des intéressés137, sans doute à cause de ses faiblesses d'applicabilité pour les infractions d'omission et de négligence138, il faut constater qu'une simple interpretation philosophique de l'acte a abouti à de grandes conséquences juridiques et a réussi à développer une notion moderne et très influente mondialement de mens rea de faute ou de blâme.
 

B- Aspects philosophiques de Ia théorie finaliste de l'acte
 

          Nous avons déjà mentionné précédemment que la façon de décrire l'acte selon la théorie finaliste correspondait à celle de la pratique langagière courante  et ajoutons la façon ordinaire de concevoir et de penser aux actions.  Nous pourrions dire également que cette théorie fait appel à une vision de l'homme comme un être faisant partie d'une société.
 

         Selon Fletcher la théorie de Welzel se rattache à la philosophie de Wittgenstein et «à son attaque soutenue contre la tendance "mentaliste" dans la philosophie psychologique»139.  Fletcher explique que Wittgenstein n'interprète pas l'intention («intending») comme un état d'esprit, à la manière du juriste, mais plutôt, selon Fletcher,  [Traduction] «qu'agir intentionnellement est une façon d'agir»140.
 

          Le message que Wittgenstein nous livre dans ses Philosophical Investigations141 est que la philosophie [traduction] «vise à éliminer les difficultés, les perplexités et les problèmes qui proviennent de notre incompréhension de l'usage présent du langage»142.   Dans ses Philosophical Investigations, Wittgenstein écrit que [traduction] «la philosophie ne peut en aucun cas s'immiscer dans le language ordinaire; en définitive, la philosophie ne peut que décrire le langage»143 .   Voici comment Fletcher explique ce message philosophique:
 

[Traduction] Percevoir que d'autres personnes agissent intentionnellement est implicite dans la façon que nous sommes élevés.  Apprendre le langage de «l'intention», c'est apprendre quand les circonstances nous forcent à dire qu'une personne a eu l'intention de frapper une autre plutôt que de dire que le coup était accidentel ou causé distraitement144.


          Évidemment, les cas ne sont pas toujours aussi simples que dans l'exemple soumis précédemment  (A qui tire une balle dans la tête de B à un mètre de distance) mais même dans les cas difficiles, nous devons être d'accord avec Duff :
 

[Traduction] Dans d'autres cas [...] il peut y avoir plus de doutes sur les intentions de l'agent, et nous pouvons évidemment parler de déduire ses intentions à partir de la preuve que nous disposons et du risque que nos déductions soient erronées. Mais nos déductions ne viennent pas des "comportements qui soient neutres" ni d'opérations mentales privées.  Elles nous viennent des actions ou certains aspects des actions que nous observons dans le scénario plus large où celles-ci se déroulent145 .


CONCLUSION
 

           Dans la première partie de cet article, nous avons analysé la conception austinienne de l'acte, un raffinement du dualisme classique.  L'acte, le mouvement corporel, est causé par les volitions.  Les conséquences de l'acte, elles, sont du domaine de l'intention.  La théorie d Austin apparaît donc comme un double dualisme.
 

          La critique de la théorie austinienne de l'acte nous a révélée qu'Austin,  en élaborant sa théorie,  a sans doute été influencé par la méthodologie des sciences naturelles qui prévalait au XIXe siècle.  Austin a utilisé la méthode dite de la réduction, propre à l'empirisme, pour réduire l'action humaine à un mouvement corporel causé par les volitions. Il est juste de décrire la méthode de connaissance d'Austin de «causalité épistémologique» qui ne semble pas différente du «dualisme épistémologique».  La critique démontre que la théorie austinienne est dépassée scientifiquement, qu'elle est en contradiction avec la façon ordinaire de décrire les actions humaines dans la pratique langagière courante et en contradiction avec la façon de tous les jours de concevoir nos actions et celles des autres.  D'un point de vue épistémologique, l'approche austinienne de l'acte oublie tous les moyens de connaissance qui nous viennent de notre interaction sociale avec les autres êtres humains et dont le langage est une facette.  La vue restreinte de l'acte, à la manière austinienne,  explique sans doute certaines opinions de nos tribunaux.
 

          Dans la deuxième partie, nous avons étudié la théorie finalists de l'acte, telle qu'avancée par le Professeur Welzel.  Selon sa théorie,  l'acte est téléologique ou dirigé vers un but.  Tout acte est par définition intentionnel.   Comme conséquence juridique de cette affirmation, la mens rea  psychologique fait partie de l'actus reus.  Bien que cette théorie n'a jamais été acceptée par la majorité des intéressés, elle a néanmoins donné lieu à des développements importants en droit pénal allemand, nommément pour les conditions de la punissabilité d'une infraction et pour la signification moderne de la mens rea allemande.
 

           La théorie de WeIzel se veut plus près de la façon que les gens conçoivent l'action humaine. Elle rejoint également le souci philosophique de Wittgenstein.
 

           Je ne sais si cet article aura l'effet souhaité, soit que le lecteur voit l' intention dans l'action plutôt que l'intention «accompagnant» l'action.  Cette "autre" vision permettre au théoricien de droit pénal de concevoir l'intention comme faisant partie de l'acte, de l'actus reus.  Cette simple unification, 'actus reus et intention, lui ouvrira toute une perspective nouvelle sur ce que la vraie mens rea  pourrait être. Comme point de départ, l'étude du droit comparé allemand sera utile afin que l'on puisse bénéficier des travaux importants qui ont déjà été accomplis par nos collègues allemands.  L'on pourra aussi appliquer la philosophie de Wittgenstein pour clarifier l'expression «état d'esprit blâmable» qui ne constitue pour l'auteur qu'un piège du langage. Un accusé ne commet pas une infraction avec un «état d'esprit blâmable». L'expression «état d esprit blâmable» mélange deux expressions ou notions distinctes : l'état d'esprit (l'intention par exemple) et le blâme.  Blâmer, c est porter un jugement défavorable sur quelqu un pour ce qu"il a fait.   Dans quelles circonstances pouvons-nous blâmer quelqu'un pour une action intentionnelle injustifiée?  La réponse nous donnera le sens véritable de ce qu'est la mens rea dans son sens normatif.

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Notes

1.  Karl JASPERS, Introduction à la philosophie, Paris: Union Générale d'Éditions, 1966, p. 17.

2.  On excusera le style au masculin.

3.  Code criminel, L.R.C. 1985, c. C-46,  art. 17.

4.  A. MAYRAND, Dictionnaire de maximes et locutions latines utilisées en droit, Cowansville: Éditions Yvon Blais, 1985, p. 9.  Le juge Mayrand ajoute aussi comme définition de l'actus reus, "l'élément matériel" qui est l'expression utilisée dans la doctrine.  La signification de l'actus reus dans la doctrine est loin d'être claire: J. FORTIN et L. VIAU, Traité de droit pénal, Montréal: Éditions Thémis, 1982, p. 77: "Celle-ci [la notion d'actus reus] désigne la conduite prohibée [...]";  E. COLVIN, Principles of Criminal Law, Toronto: Carswell, 1986, p. 51: "The actus reus of an offence is the conduct which its definition required to have occurred"; A. MEWETT et M. MANNING, Criminal Law, 2e éd., Toronto: Butterworths, 1985, p. 68: "That act that is said to be required before there can be criminal conduct is known as the actus reus [...]".  Dans Leary c. La Reine, [1978] 1 R.C.S. 29, le juge Dickson définit l'actus reus à la p. 34 comme "l'acte qui constitue le crime en question [...]".

5.  FORTIN et VIAU, id., p. 70: "Littéralement, mens rea signifie état d'esprit, intention coupable [...]".  J. FORTIN dans Droit pénal Général (notes de cours), 1ère année, Licence en droit, Faculté de droit, Université de Montréal, année académique 1969-70 mentionne à la p. 67: "La doctrine enseigne que la mens rea désigne deux états d'esprit, l'intention et l'insouciance".

6. Voir MAYRAND, op. cit., note 4, p. 8.  L'origine de cette phrase semble remonter à St-Augustin et non à Coke, voir A. LEVITT, "The Origine of the Doctrine of Mens Rea", (1922-23) 17 Ill. L. Rev. 118, sa note 1.

7.  Voir J. HALL, General Principles, 2ième éd., Indianapolis: Bobbs-Merrill, 1960, p. 222.

8. [1989] 1 R.C.S. 1392, p. 1430.

9.  Id., p. 1429.

10. Ludwig WITTGENSTEIN, Philosophical Investigations, Oxford: Basil Blackwell, 1968.  Traduction de "The intention with which one acts does not 'accompany' the action any more than the though 'accompanies' speech".  Texte cité dans G. FLETCHER, Rethinking Criminal Law, Boston: Little, Brown, 1978, p. 437, sa note 44.  Le lecteur est prié de montrer de l'indulgence envers mes traductions personnelles et littérales.

11. Petit Robert II, Paris: Le Robert, 1987, p. 1922.

12. R. c. Bernard, [1988], 2 R.C.S. 833, p. 843: "Tout d'abord, il faut reconnaître la nature fondamentale de l'exigence d'une mens rea.  La personne qui a causé un préjudice doit l'avoir fait dans un état d'esprit blâmable [...]" (juge Dickson).

13.  Par exemple : COMMISSION DE RÉFORME DU DROIT DU CANADA [ci-après C.R.D.], Droit pénal: Partie générale - responsabilité et moyens de défense, Document de travail 29, Ottawa, Ministère des Approvisionnements et Services Canada, 1982, pp. 25-26:

[...] la notion de mens rea peut être comprise de deux façons.  D'une part, elle peut renvoyer à des facteurs d'ordre psychologique comme l'intention, l'insouciance ou la connaissance.  Dans ce sens, le mens rea a une valeur purement descriptive et la responsabilité se fonde sur trois éléments: (1) un actus reus, (2) un mens rea, et (3) l'absence d'un moyen de défense.  [...]  D'autre part, on peut donner au mens rea un caractère normatif.  Selon cette conception, dire qu'une personne a le mens rea revient à dire qu'elle est en faute parce qu'elle a accompli un acte interdit avec l'état d'esprit requis et qu'elle n'avait aucune excuse ou justification pour l'accomplir.  Autrement dit, les mots mens rea signifient la culpabilité ou le blâme.
          Voir aussi G. CÔTÉ-HARPER, A. MANGANAS et J. TURGEON, Droit pénal canadien, 3e éd., Cowansville: Éditions Yvon Blais, 1989, pp. 253-255; FORTIN et VIAU, op. cit., note 4, pp. 70-75.  Il est indéniable que le professeur Jacques Fortin et la C.R.D. furent grandement influencés par le livre de Fletcher, Rethinking Criminal Law, op. cit., note 10.  Fortin fut vice-président de la C.R.D. et, pendant de nombreuses années, un des ses conseillers spéciaux.  La doctrine pénale canadienne-anglaise se montre quelque peu réfractaire à la mens rea dans son sens normatif et n'en discute à peine.  Don STUART, auteur de Canadian Criminal Law: A Treatise, 2e éd., Toronto: Carswell, 1987, p. 389 s'oppose à une partie importante de la doctrine de Fletcher.

14. Voir C.T. SISTARE, "Models of Responsibility In Criminal Theory: Comment on Baker", (1988/89) 7 Law and Phil. 295, pp. 305-307.  Sans doute que les théoriciens utilisent le mot "normatif" dans son acceptation des sciences normatives "dont l'objet est constitué par des jugements de valeur, et qui donne des règles [...]"  (Petit Robert I, Paris: Le Robert, 1986, p. 1281).

15.  Renvoi sur la Motor Vehicle Act (C.B.), [1985] 2 R.C.S. 486 et R. c. Vaillancourt, [1987] 2 R.C.S. 636.  Sur la notion doctrinaire de la mens rea suite à ces arrêts, voir par exemple les articles d'André JODOUIN, "L'incidence de l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés sur la mens rea", dans Formation Permanente du Barreau du Québec (dir.), Nouveaux développements en droit criminel découlant de la Charte canadienne des droits et libertés, Cowansville: Éditions Yvon Blais, 1988, p. 15 et "Systèmes, interprétation et culpabilité", dans Ernest Capparos et al. (sous la direction de), Mélanges Louis-Philippe Pigeon,  Montréal: Wilson & Lafleur, 1989, (Collection Bleue, Série Ouvrages Collectifs, Faculté de droit, Section de droit civil, Université d'Ottawa), aux  pp. 235-261, à la p. 237.

16.  J'ai songé à appeler cette mens rea, la mens rea d'éthique, mais je me suis ravisé.

17.  Ici, je parle de la mens rea, telle que développée par la C.R.D., op. cit., note 13 et par FLETCHER, op. cit., note 10 avec sa notion "attribution".  La mens rea comme notion vague de "turpitude morale" remonte au moins au siècle dernier, voir FORTIN et VIAU, op. cit., note 4, pp. 70-73.

18.  Voir la critique du livre de FLETCHER, Rethinking Criminal Law, op. cit., note 10 par W. Cole DURHAM, "Book Review - Rethinking Criminal Law", [1979] Utah L. Rev. 628.

19.  C.R.D., op. cit., note 13, p. 207.

20.  Francis JACQUES dans sa préface du livre de Gilbert RYLE, La notion d'esprit, Paris: Payot, 1978 (traduction de The Concept of Mind, 1949), se porte à la défense de Descartes contre le dualisme que Ryle attribue à Descartes.  Jacques cite le passage suivant de Descartes qui soulève le doute à savoir si Descartes est le grand responsable du dualisme:

Je ne suis pas logé en mon corps comme un pilote dans son navire mais, outre cela, je lui suis conjoint très étroitement, tellement confondu et mêlé que je compose comme un seul tout avec lui. [p. i de la préface]
        Selon JACQUES, c'est plutôt John Locke, philosophe anglais (1632-1704), à qui l'on devrait faire le reproche:
C'est lui, et non Descartes, qui prescrit l'examen minutieux des états et opérations de conscience [...] C'est le philosophe anglo-saxon, plutôt que le bouc émissaire français, qui soutient que l'esprit peut voir ou regarder ses propres opérations à la lumière qu'elles émettent. [p. vi de la préface]
21. JACQUES, id., p. iii : "Le corps et l'esprit, le fantôme et la machine, seraient deux entités en interaction, de telle sorte que certains événements dans l'une seraient causés par des évènements dans l'autre."

22. R.A. DUFF, "Codifying Criminal Fault: Conceptual Problems and Presuppositions" dans I.H. Dennis (dir.), Criminal Law and Justice, Londres: Sweet et Maxwell, 1987, pp. 93-108 à la p. 97.  Ajoutons que les déclarations de l'accusé sont parfois présentées en preuve par la Couronne pour démonter qu'elles sont fausses à la lumière de l'ensemble de la preuve.  Cette tactique permet de révéler "l'esprit coupable".

23.  Ibid.  Traduction de "Epistemological Dualism".

24.  W. BLACKSTONE, Commentaries on the Laws of England, vol. 4, of Public Wrongs, Chicago: University of Chicago, 1979 (réimpression de l'édition de 1769), p. 21:

Indeed, to make a complete crime, cognizable by human laws, there must be both a will and an act.  For though, in foro conscientae, a fixed design or will to do an unlawful act is almost as heinous as the commission of it, yet, as no temporal tribunal can search the heart, or fathom the intentions of the mind, ortherwise than as they are demonstrated by outward actions, it therefore cannot punish for what it cannot know.
25.  Perka et al. c. La Reine, [1984] 2 R.C.S. 232, p. 249 (obiter dictum).  La doctrine traite généralement de cette condition comme se rapportant à l'actus reus.

26. Cette expression empruntée à la doctrine pénale allemande me semble plus précise que de dire "condition de responsabilité" car notre droit pénal n'a pas défini de façon complète le champs de la responsabilité ou de la culpabilité.  Il est surprenant de voir la Cour suprême du Canada rendre des décisions sur l'art. 11(e) de la Charte (la présomption d'innocence) sans définir au préalable la culpabilité!

27.  On peut questionner cette exigence de l'acte volontaire pour les infractions de commission intentionnelle puisque l'absence de "contrôle conscient" équivaut à une absence d'intention.  Néanmoins cette exigence peut être utile pour le théoricien favorisant le dualisme et qui définit des concepts comme l'insouciance.  C'est ainsi que la C.R.D. dans son projet de code pénal, Pour une nouvelle codification du droit pénal, Ottawa: Commission de réforme du droit du Canada, 1987 (Collectio Rapport; p. 26, définit-elle en somme l'insouciance (la témérité) comme un acte austinien avec des représentations.  Voir aussi  la troisième définition de l'intention de John AUSTIN dans Lectures on Jurisprudence or The Philosophy of Positive Law, Vol. 1, 3e éd., Londres: John Murray, 1869,  pp. 436-437 et le texte principal infra pour la définition de l'acte austinien.  Cette façon de définir l'insouciance correspond en droit pénal européen à la théorie de la représentation, voir J.M. RICO, "L'intention criminelle en droit comparé (Étude des législations hispano-américaines)" dans Travaux du quatrième colloque international de droit comparé du Centre Canadien de droit comparé, Ottawa: Université d'Ottawa, 1967, pp. 164-183 aux pp. 169-170.  L'utilité de l'exigence de l'acte volontaire s'avère précieuse pour les infractions de négligence, de responsabilité stricte et absolue.

28.  FORTIN et VIAU, op. cit., note 4, p. 89 et H.L.A. HART, Punishment and Responsibility, Oxford: Clarendon Press, 1968, pp. 97 et 99.

29.  Douglas N. HUSAK, Philosophy of Criminal Law, Totowa (New Jersey): Rowman & Littlefield, 1987, p. 91:

A "mental element [is] contained in the definition of the act,"  according to Williams, largely because he holds that involuntary conduct cannot be genuine action.  Thus the distinction between actus reus and mens rea, initially tolerably clear, is deliberately blurred.


30.  DUFF, op. cit., note 22, p. 107, sa note 25: "But here too the influence of dualism is visible, in the view that a voluntary act must involve a (mental) 'volition' or 'act of will'."

31.  Dans la doctrine pénale européenne, ce concept s'identifie au dol éventuel (dolus eventualis).  La question de savoir si l'intention devrait comprendre l'insouciance intrigue à la fois les philosophes et les juristes (voir HART, op. cit., note 20, pp. 110-122 et l'arrêt R. v. Buzzanga and Durocher, (1979) 43 C.C.C. (3d) 193 (C.A. de l'Ont.)).

32.  Il me semble que l'absence de volonté envers le résultat devrait être une des caractéristiques des infractions de négligence comportant un résultat (par exemple, la négligence criminelle causant la mort, art. 220 du Code criminel, op. cit.,  note 3).  On pourrait même dire que le résultat apparaît à l'agent comme une surprise.  L'intention, au contraire, comporte un élément de volonté bien que celui-ci soit le plus faible dans l'insouciance lorsque celle-ci est comprise comme une forme d'intention.  Dans l'arrêt R. c. Tutton, précité, note 8, p. 1430, la moitié des juges sont d'avis que la négligence comporte l'exclusion d'une "intention positive de parvenir à un résultat donné".  Quant aux infractions d'omission intentionnelle ou de négligence, celles-ci se distinguent aussi des infractions de commission intentionnelle, car l'on ne punit pas l'action dite positive mais plutôt son abstention.  Les infractions d'état et de possession mériteraient sans doute une réflexion particulière comme le fait la doctrine nord-américaine.

33.  HUSAK, op. cit., note 29, p. 21: "The range and diversity of criminal offenses proved resistant to the formation of grand generalizations of substance.  The few principles that indeed pertain without exception to all offences have the appearance of platitudes".  Cet auteur fait une étude intéressante sur la généralisation en droit pénal.

33a. Précité, note 25, pp. 248-250.

34.  Sur ce sujet, voir Allan R. WHITE, Grounds of Liability, An Introduction to the Philosophy of Law, Oxford: Clarendon Press, 1985, p. 35 et les nombreux philosophes anglais cités.

35. Lord LLOYD of HAMSTEAD et M.D.A. FREEMAN, Lloyd's Introduction to Jurisprudence, 5e éd., Londres: Stevens, 1985, p. 16.

36.  Encyclopedia Britannica, vol. 2, Chicago: Benton, 1968, p. 772.

37. Guido FASSO, Histoire de la Philosophie du droit, XIXe et XXe siècles, [traduction de Storia de la filosophia del diritto], Paris: L.G.D.J., 1976, p. 21 (Collection; Bibliothèque de Philosophie de droit; vol. XX).

38.  Id., p. 22.

39. Voir W.A. MORISON, John Austin, Londres: Edward Arnold, 1982 (Collection; Jurists: Profiles in Legal Theory). Morison indique que Austin lut les livres sur le droit pénal d'Anselm von Fuerbach et C.F. Rosshirt (p. 61).

40. John AUSTIN, op. cit., note 27, ("Lecture XVIII - 'Will and Motive'", aux pp. 419-430 et  "Lecture XIX - 'Intention'", aux pp. 440-437).

41.  E.S. BINAVINCE, "The Theory of Negligent Offenses in the Anglo-American Criminal Law", (1963) 33 Philippine L.J. 429.

41a.  MORISON, op.cit., note 39, p. 25 et  R. CROSS, "The Reports of the Criminal Law Commissioners (1833-1849) and the Abortive Bills of 1853" dans P.R. Glazebrook (dir.), Reshaping the Criminal Law, Londres: Stevens & Sons, 1978, pp. 5-20.

42. AUSTIN, op. cit., note 27, pp. 427 et 432 pour l'ensemble des idées exprimées dans notre paragraphe.

43. Id., pp. 424 et 427.  Traduction de:

Certain movements of our bodies follow invariably and immediately our wishes or desires for those same movements [...].

These antecedent wishes and these consequent movements, are human volitions and acts (strickly and properly so called).  They are the only objects to which those terms will strickly and properly apply. [p. 424]

[...]

[...] A Voluntary movement of my body, or a movement which follows a volition, is an act.  [p. 427]


44. Id., pp. 424-425.  Traduction de:

But, besides the antecedent desire (which I style a volition), and the consequent movement (which I style an act), it is commonly supposed that there is a certain 'Will' which is the cause or author of both [...].

That this same 'will' is just nothing at all, has been proved [...] by the late Dr. Brown: Who has also expelled from the region of entities, those fancied beings called 'powers' of which this imaginary 'will' is one [...] he was (I believe) the first who understood what we would be at, when we talk about the Will, and the power or faculty of willing.

All that I am able to discover when I will a movement of my body, amounts to this: I wish the movement.  The movement immediately follows my wish of the movement.


        HART, op. cit., note 28, p. 97, sa note 22, mentionne que le Docteur Brown étudia le droit et la médecine, enseigna la philosophie, fut influencé par David Hume et écrivit le livre Inquiry into the Relation of Cause and Effect (1818).  F. COPLESTON, A History of Philosophy, Book II, vol. V (Hobbes to Hume), New York: Doubleday (Image Edition), 1985, aux pp. 383-391, résume la philosophie empirique de Thomas Brown (1778-1820) et mentionne:

Brown defines a cause as "that which immediately precedes any change, and which, existing at any time in similar circumstances, has been always, and will be always, immediately followed by a similar change."   The elements, and the only elements combined in the idea of cause are priority in the observed sequence and invariable antecedence.  Power is only another word for expressing the "antecedent itself, and the invariableness of the relation" [...].  Similarly, "when I say that I have mentally the power of moving my hand, I mean nothing more than that, when my body is in a sound state, and no foreign force is imposed on me, the motion of my hand will always follow my desire to move it" [notes omises; les citations sont de Brown].


45.  AUSTIN, op. cit., note 27, pp. 433-434:

But every act is followed by consequences: and is also attended by concomitants, which are style its circumstances.

To desire the act is to will it.  To expect any of its consequences is to intend those consequences.

The act itself is intended as well as willed [...].

A consequence of the act is never willed [...].

When I will an act, I expect or intend the act which is the appropriate object of the volition.  And when I will an act, I may expect, contemplate, or intend, some given event, as a certain or contingent consequence of the act which I will.

Hence (no doubt) the frequent confusion of Will and Intention.  Feeling that will implies intention (or that the appropriate objects of volitions are intended as well as willed), numerous writers upon Jurisprudence [...] employ "will" and "intention" as synonymous or equivalent.  They forget that intention does not imply will; or that the appropriate objects of certain intentions are not the appropriate objects of volitions.  The agent may not intend a consequence of his act.  In other words, when the agent wills the act, he may not contemplate that given event as a certain or contingent consequence of the act which he wills.

       Le lecteur pourra reconnaître l'influence austinienne lorsque la juge Wilson écrit dans l'arrêt R. c. Bernard, précité, note 12, p. 889: "[...] dans les rares cas où l'intoxication soulève des doutes quant à l'existence de l'intention minimale qui caractérise un comportement conscient et volontaire".

46. AUSTIN, op. cit., note 27, pp. 427-428 (voir aussi la p. 432).  La difficulté de traduction de la dernière phrase montre-t-elle l'impossibilité logique de la théorie d'Austin?  Traduction de:

The only difficulty with which the subject is beset, arises from the concise or abridged manner in which (generally speaking) we express the objects of our discourse.

 Most of the names which seem to be names of acts, are names of acts, coupled with certain of their consequences.  For example, if I kill you with a gun or pistol, I shoot you: And the long train of incidents which are denoted by that brief expression, are considered (or spoken of) as if they constituted an act, perpetrated by me.  In truth, the only parts of the train which are my act or acts, are the muscular motions by which I raise the weapon; point it at your head or body, and pull the trigger.  These I will.  The contact of the flint and steel; the ignition of the powder, the flight of the ball towards your body, the wound and subsequent death, with the numberless incidents included in these, are consequences of the act which I will.  I will not those consequences, although I may intend them.


        Une étude plus approfondie aurait permis de constater si les philosophies de Locke, Hume and John Stuart Mill ont  pu influencer la position d'Austin sur le language.

47.  The Common Law, Boston: Little, Brown, 1881, p. 91: "An act is always a volontary muscular contraction, and nothing else.  The chain of physical sequences which it sets in motion or directs to the plaintiff's harm is not part of it, and very generally a long train of such sequences intervenes".  Pour les distinctions entre Austin et Holmes, voir BINAVINCE, loc. cit., note 41,  pp. 429-432.  Également, Roscoe Pound appelle un acte, "a voluntary muscular motion", voir WHITE, op. cit., note 34, p. 29.

48. BINAVINCE, id., p. 431.

49. FASSO, op. cit., note 37, p. 24.

50.  Id., p. 18.

51. Dernière édition par H.L.A. Hart, Londres, 1954.

52.  Selon A. TRUYOL Y SERRA, "John Austin et la philosophie du droit positif" dans Philosophies du droit anglaises et américaines et divers essais, Paris: Sirey, 1970, pp. 153-163 à la p. 156 (Collection; Archives de Philosophie du droit; numéro 15), la science de la jurisprudence "s'occupe des lois positives, ou des lois au sens strict", la science de la moralité positive concerne les lois humaines comme les "lois de l'honneur" et la science de l'éthique qui "considère le droit ou la moralité positive tels qu'ils devraient être".

53.  COPLESTON, A History of Philosophy, Book III, vol. III (Bentham to Russell), New York: Doubleday, 1995, p. 2, traduction de "[..] of the whole to its parts, of the complex to its primitive or simple elements [...]".  Copleston soumet que la méthode "of reductive analysis" pratiqué par Hume fut continué par Bentham.  On ne peut que conclure que Austin suit également cette méthode.

54.  J. DRESSLER, Understanding Criminal Law, New York: Matthew Bender. 1987. p. 67:

Today we realize that all bodily movements occur as the result of complicated and physiological and psychological processes, not all of which are clearly understood.  No bodily act, however, occurs simply as the result of wishing it to occur.  Rather, various external and internal stimuli work in conjunction to cause the body to perform the acts in question.
           Voir aussi D. O'CONNOR, "The Voluntary Act", (1975) 15 Med. Sc. Law 31.

55.  HART, op. cit., note 28.

56. HART, ibid., pp. 99-100.  Selon Hart, la théorie austinienne ne peut pas s'appliquer aux omissions.

57.  Id., p. 101.  Traduction de "[...] an out-dated fiction - a piece of eighteenth-century psychology which has no real application to human conduct".

58.  Ibid.

59.  Ibid.

60.  Ibid.

61. Ibid.

62. Id., pp. 101-102.

63. Id., Traduction de : "[...] language here does usefully mark a vital, factual distinction which the theory we are critizing ignores".

64.  Ibid. Traduction de: "The simple but important truth is that when we deliberate and think about actions, we do so not in terms of muscular movements but in the ordinary terminology of actions".

65.  Id., p. 103.  Traduction de:

What happens in normal action is that if we decide to do something we think of it in the ordinary terminology of action (as hitting someone, or writing something) and given that we have learnt to do these things and our faculties are unimpaired, our muscular movements normally follow smoothly on our decision.
           Selon Hart, l'acte involontaire n'est pas subordonné aux buts conscients d'action de l'agent (voir la p. 105).  Pour une critique de Hart sur ce point, voir W.A. MURPHY, Retribution, Justice, and Therapy, Essays in the Philosophy of Law, Dordrecht: Reidel, 1979, aux pp. 117-121.

66.  HART, op. cit., note 28, pp. 118-119.  Dans son étude sur l'intention, Hart ne développe pas ses notions de "mental or volitional elements" qui sont nécessaires à l'action intentionnelle.  Celui-ci concentre ses efforts surtout sur un aspect, soit la prévisibilité des conséquences.  À ce titre, Hart reste dans la lignée austinienne.

67. Hyman GROSS, A Theory of Criminal Justice, New York: Oxford University Press, 1979, pp. 48-61.

68. Id., p. 50.  Traduction de: " [...] do not reflect common sense, but simply resolve summarily by fiat an important program that all of us in a more thoughtful moment perceive as difficult and obscure."

69. Id., p. 53.  Traduction de : "[...] neither the occurence nor the character of the criminal act can be known simply by reference to bodily movements".

70.  Id., p. 51.  Gross pose la question suivante: "But even paying the closest attention to bodily movements, how are we to distinguish swearing falsely from swearing truly [...]?   Sur ce sujet, voir aussi A.C.E. LYNCH, "The Mental Element in the Actus Reus", (1982) 98 L.Q.R. 109.

71.  Id., p. 133.  Traduction de : "The act itself, or rather the very idea of an act, still remains veiled in mystery."

72. BINAVINCE, loc. cit., note 41, p. 434.  Traduction de : "The criminal law does not operate in a world of tangible reality, but also in concepts and meanings".

73. Alan R. WHITE, ed., The Philosophy of Action, Londres: Oxford Press, 1968, p. 166.

74.  WHITE, op. cit., note 34.  J.L. Austin lui enseigna la philosophie morale à Oxford.  White est un philosophe du langage mais rien n'indique dans son livre qu'il a reçu une formation en droit.

75. Id., p. 26.

76. Ibid.

77. Id., pp. 26-27.  J'ai modifié l'exemple de l'homicide.  White ne dit pas que C a "tué" mais qu'il a commis un homicide.

78.  Id., p. 26.  Traduction de : "An Act may be described in explanatory terms by reference to its purpose, reason, or cause [...] ."  On pourrait comparer cette proposition avec la théorie finaliste de l'acte.

79. Id., pp. 28-29.

80. Id., pp. 25-26.

81. Id., p. 25.  Traduction de "To act is to bring about something, to cause it to happen [...] .   My act in raising my arm is to cause my arm to rise".

82.  Id., p. 29.  Le tout n'est pas sans difficultés conceptuelles et j'espère avoir bien rendu la pensée de White.  On peut remarquer l'influence de Wittgenstein sur White.  Voici quelques passages de Wittgenstein, Philosophical Investigations, op. cit., note 10, p. 161e:

621.  Let us not forget this: when "I raise my arm", my arm goes up.  And the problem arises : what is left over if I substract the fact that my arm goes up from the fact that I raise my arm? [...]

622.  When I raise my arm I do not usually try to raise it.

83.  WHITE, op. cit., note 34, pp. 30-31.

84.  Voir supra, note 43.

85.  WHITE, op. cit., note 34, p. 30.  White cite des auteurs.

86.  Précité, note 25.

87. WHITE, op. cit., note 34, p. 31.

88.  RYLE, op. cit., note 20.

89.  Ibid., p. 63.

90. Petit Robert I, supra, note 14, p. 174.  Glanville WILLIAMS fait mention de Ryle dans deux de ses livres.  Dans Criminal Law: The General Part, Londres: Stevens, 1961, p. 12, note 1,  il écrit :

Holmes, following Austin defined an act as a muscular contraction resulting from an operation of the will (The Common Law 54) but it seems better to avoid referring to will as a faculty of mind.  See Gilbert Ryle, The Concept of Mind (London 1949, chap. 3).


           Dans son Texbook of Criminal Law, 2e éd., Londres: Stevens, 1983, p. 148, Williams semble avouir changé d'idée sur Ryle:

The element of volition in an act has greatly exercised the philosophers.  Two of them, Ryle and Melden [ce dernier, auteur de Free Action, Londres: Routledge & Kegan Paul, 1961] have attempted to argue away the notion of will.  They build their case upon the difficulty of identifying conscious volitions accompanying bodily movements.  Certainly it would be false to assume that every act is the result of deliberation [...] .  But the mental functioning that controls movement is not conscious determination, and it takes place at practically the same time as movement.  Will is the mental activity accompanying the type of bo movement that we call an act.


91. DUFF, op. cit., note 22, p. 100.  Traduction de:

Both agree that what we observe are bodies and their "colourless behaviour": movements which can be described without reference to any "mental" notions of purpose or intention.  They differ on whether we should understand such psychological concepts as referring to distinct mental processes which lie behind and must be inferred from those bodily movements; or, reductively, as more complex ways of referring to those bodily movements themselves.


92.  FLETCHER, op. cit., note 10, p. 434.

93.  Ibid., Traduction de:

Heavily influenced by the methodology of the natural sciences, we are inclined to feel that we understand phenomena by perceiving mechanistic connections between cause and effect.  The perspective thus neglected is the interdependence of human subjects and modes of understanding of human subjects and modes of understanding that arise from human interaction.


94.  Citation prise dans le Grand dictionnaire encyclopédique Larousse, tome 4, Paris: Larousse, 1983, p. 694.

95. Extrait du texte suivant de F. COPLESTON, A History of Philosophy, Book III, Vol. IX (Maine de Biran to Sartre), New York: Doubleday (Image Edition), 1985, pp. 399-400:

[...] Merleau-Ponty does not deny that the body can be treated as an object and considered as such in scientific inquiry and research.  But in his view this possibility presupposes the human body as being itself a subject, in dialogue with the world and with other persons.  It is not a question of maintaining that there is in the body a distinct soul or spirit, in virtue of which the composite being can be described as a subject.  It is the body which is the subject.  This view obviously entails understanding body in a sense rather different from that in which it would be understood within a dualistic framework of thought, namely as opposed to mind or spirit.  It is precisely this opposition which Merleau-Ponty wishes to overcome and thinks that he has overcome through his concept of body-subject.  If we start with dualism and then try to overcome it by making the one or other factor primary, we either reduce mind to body or identify the real man with an incorporeal soul or spirit.  Merleau-Ponty however rejects such reductionism and insists that the human body is one reality which is at the same time material and spiritual.
96. Ibid.

97. Petit Robert II, op. cit., note 11, p. 1192.

98.  DUFF, loc. cit., note 22, p. 101.  Traduction de:

Dualism portrays the interpretation of human actions on the model of scientific explanations of empirical phenomena: we observe some effect, and make inferences to the unobserved process which caused it.


99. P.L. BERGER et T. LUCKMAN, The Social Construction of Reality - A Treatise in the Sociology of Knowledge, Garden City: Doubleday, 1967, p. 23.  Traduction de : "The reality of everyday life [...] presents itself to me as an intersubjective world, a world that I share with others."

100. Le paragraphe 267(1) du Code criminel, op. cit., note 3, définit cette infraction ainsi:

267 (1) [Agression armée ou infliction de lésions corporelles] Est coupable d'un acte criminel et passible d'un emprisonnement maximal de dix ans quiconque, en se livrant à des voies de fait, selon le cas [..]
    b) inflige des lésions corporelles au plaignant [...]

267 (1) [Assault with a weapon or causing bodily harm] Every one who, in committing an assault [...]
    (b) causes bodily harm to the complainant [...] .


        La discussion du problème est facilitée si la version anglaise est utilisée.
 

101. L'alinéa 265(1)a) du Code criminel, ibid.,  se lit ainsi dans les deux langues:

[Voies de fait] Commet des voies de fait, ou se livre à une attaque ou une agression, quiconque, selon le cas:
a) d'une manière intentionnelle, emploie la force, directement ou indirectement, contre une autre personne sans son consentement;

[Assault] A person commits an assault when
(a) without the consent of another person, he applies force intentionally to that other person, directly or indirectly;


102.  R. c. Lee, (1988) 29 O.A.C. 379, à la p. 381 (C.A.) et R. c. Brooks, (1988) 41 C.C.C. (3d) 157 (C.A. de l'Alberta).  La Cour suprême du Canada ne s'est pas encore prononcée sur la question qui a été soulevée dans l'arrêt R. c. Vaillancourt, précité, note 15, p. 653.

103.  Voir l'argumentation de l'appelant dans R. c. Brooks, précité, note 102, et M. MARCHAND, "L'arrêt Vaillancourt et la mens rea en tant qu'exigence constitutionnelle", Congrès du Barreau du Québec 1989, Droit pénal, Capsule 19, 5 mai 1989, 26 p.

104.  R. c. Bernard, précité, note 12, p. 863.  Le jugement du juge McIntyre constitue l'un des trois jugements rendus dans cet arrêt.  Pour faire la distinction, le juge McIntyre se fonde sur la partie suivante du jugement du juge Fauteux dans l'arrêt R. v. George, [1960] R.C.S. 871, p. 877:

En étudiant la question de la mens rea [psychologique], il y a lieu d'établir une distinction entre (i) l'intention qui s'applique aux actes en fonction des buts visés et (ii) l'intention qui s'applique aux actes indépendamment des buts visés.  Dans certains cas, l'intention générale de perpétrer l'acte suffit pour qu'il y ait crime alors que dans d'autres cas il doit y avoir, outre l'intention générale, une intention spécifique de commettre l'acte [la traduction provient de l'arrêt Bernard, p. 863 car l'arrêt George provient d'une époque où les jugements étaient unilingues].


105. Ibid.

106. Ibid.

107.  Ibid.

108. Austin mentionne que l'acte est non seulement volontaire mais qu'il est aussi intentionnel, se produisant avec des concomitances, soient des circonstances, voir le texte à la note 45.

109.  FLETCHER, op. cit., note 10, p. 467.

110.  Le grand débat juridique et philosophique sur le bien-fondé de la distinction entre les "justifications" et les "excuses" que Fletcher a soulevé dans ses écrits est une "idée" allemande.  À ce sujet, voir par exemple Bruce P. ARCHIBALD, "The Constitutionalization of the General Part", (1988) 67 R. du B. Can. 403-454, à la p. 406, note 14.  Dans l'arrêt Perka et al. c. La Reine, précité, note 25, la Cour suprême du Canada, en acceptant l'opinion de Fletcher sur les excuses, adopte implicitement une "idée" allemande et une partie fondamentale de la théorie pénale allemande.  Dans Perka, la Cour accepte la distinction entre les justifications et les excuses mais sans relier cette distinction à Fletcher.  Voir aussi la note 13, supra, sur l'influence de Fletcher sur la C.R.D.

111. C.R. SNYMAN, Criminal Law, Durban: Butterworths, 1984, p. 38.  Le professeur Snyman fit des études de droit en Allemagne et enseigne le droit en Afrique du Sud.  Ce livre traite du droit pénal en Afrique du Sud, cependant Snyman y incorpore des parties de la théorie allemande.

112.  Une étude plus poussée nous aurait permis de faire une comparaison précise entre ces deux théories.

113. Voir par exemple, C.R. SNYMAN, "The 'finalistic' theory of an act in criminal law", (1979) 3 South African  Journal of  Criminal Law and Criminology 3-11 et 136-144.  Snyman mentionne à la p. 5 que cette théorie est aussi appelée la "naturalistic theory of an act".

114. Franz von LISZT, Traité de droit allemand, 17e éd., traduction de René Lobstein, Paris: Giard & Brière, 1911:

L'acte c'est le fait de causer ou de ne pas empêcher un changement dans le monde extérieur. [p. 178]

Nous appelons ce changement résultat. [p. 181]

Commettre (Thun) c'est causer (provoquer) volontairement un résultat.
I. - La manifestation de la volonté apparaît ici comme volontaire, c'est-à-dire sous la forme d'un mouvement du corps [...] (Körperbewegung)  motivé par des représentations.

II. - Le résultat doit être causé par un mouvement du corps; le mouvement et le résultat doivent être l'un à l'autre dans le rapport de cause à effet (rapport de causalité).  [pp. 184-185].


La traduction du livre de Liszt, 1851-1919, est due en grande partie aux efforts du professeur français Émile Garçon.

115. SNYMAN, loc. cit., note 113, p. 4.  Traduction de : "[...] the act is any voluntary human conduct whereby some change, perceivable by the senses, is brought about in the outside world by the means of the mechanical laws of cause and effect".

116. Ibid.

117. H.-H. JESCHECK, "The doctrine of mens rea in German criminal law  - its historical background and present state" (1975) 8 Comparative and International Law Journal of Southern Africa 112-120, à la p. 117.  Jescheck est président de l'Association internationale de droit pénal et ancien directeur du Max-Planck-Institut für auslandisches und internationales Strafrecht à Fribourg-en-Brisgau, R.F.A..

118. FASSO, op. cit., note 37, pp. 263-264 mentionne que Welzel, né en 1904, est un représentant du néo-jusnaturalisme en Allemagne et qu'il procède de l'ontologie phénoménologique.  Fasso ne traite pas de la théorie finaliste de l'acte de Welzel mais de d'autres aspects philosophiques des écrits de celui-ci.

119. Pour l'évolution de la théorie finaliste, voir les diverses éditions de Das Deutsche Strafrecht (1ère en 1947 et la 11ième en 1969).

120. SNYMAN, op. cit., note 113, p. 4, appelle cette théorie en anglais, " 'finalistic' theory of an act".  FLETCHER, op. cit., note 10, p. 433, traite de cette théorie sous le titre de "The Teleogical Theory of Acting".  Après une réflexion, j'ai choisi l'appellation "théorie finaliste de l'acte" plutôt que "théorie finaliste de l'action" car cette théorie veut aussi expliquer les omissions et au Canada.  De plus, les pénalistes canadiens utilisent le mot "acte" plus souvent que le mot "action".  J'utiliserai cependant le mot "action" où le contexte est propice.

121.  SNYMAN, ibid., mentionne que cette théorie est ainsi appelée afin de la contraster avec la théorie causale de l'acte qui est propre au droit.

122.  FLETCHER, op. cit., note 10, p. 434.

123. Id., pp. 434 et 436.  Traduction de:
 

Human acting could not be understood simply as bodily movements, triggered by the will, without perceiving the aim of the action.  Human action, Welzel argued, was intrinsically purposive, not merely the external manifestation of an inner mechanism called the will.  [p. 434]
[...]
The essence of Welzel's argument [...] is that we do not perceive someone as acting unless we also perceive that the person is after something .   [p. 436]


SNYMAN, loc. cit., note 113, expose cette théorie d'une façon beaucoup plus détaillée.  Vu la difficulté de se procurer l'article, une partie importante de son texte (pp. 8-10) est cité ici:
 

Because of his knowledge (which he gains by experience) of the causal processes, man is able to appreciate the possible consequences of his conduct in advance.  He can select an aim in advance and direct, in a planned way, his conduct towards achieving this end.  Man thus subjects the mechanical or causal course of events to his "guiding" or "steering" will.  "Finality" (Finalismus, Finalitätt) is the term used to express this idea of an intentional directing of a person's conduct towards the achievement of a previously chosen goal, and finality must be regarded as the opposite of causality.  Causality is the product of the mechanical operation of a chain of causes, and the question whether a causal connection exists, is judged objectively ex post facto.  Finality is the opposite : it is by prognosis that a person calculates his conduct by subjugating the causal processes to his guiding will.  Finality is a teleological concept; Professor Welzel often contrasts finality with causality by describing finality as "being able to see", and causality, on the other hand, as "blind".  The backbone of the act is the human will, because the idea of finality is derived from the ability of the human will to select a goal in advance, and to direct his conduct towards achieving this goal.

The directing and steering of the will towards a specific goal can be separated into three stages.  First of all, there is the anticipation of the goal in the person's mind.  Secondly, there is the selection of the means necessary to attain the goal and, thirdly, there is the actual achievement of the goal in the outside world. [p. 8]

[...]

[...] The peculiar structure of an act can, from an ontological and philosophical point of view, only be explained with reference to the will of the person acting.  The will is the backbone of the act, and this is denied by the causal theory, according to which it is sufficient that the act is volontary.  By "voluntary" is meant that the person's bodily movements (and the consequences flowing therefrom) are the result of some or other willed act, though it is always immaterial exactly what the contents of this will is.  In short, according to the causal theory it is sufficient that something is willed; what is willed, is however, immaterial.  In this way the causal theory is merely interested in the outwards results of the willed act, that is, the mere causal processes which take place.   [pp. 8-9]

[...]

The directing of his will upon a certain goal by the actor, is nothing else than his intention [...] all acts are per definitionem intentional acts. [p. 10]


124. SNYMAN, id., p. 8.  Traduction de : "the concept of an act corresponds with the concept of an act in every day life [...].

125. Id., pp. 9-10.

126. FLETCHER, op. cit., note 10, p. 437.  Traduction de:

Welzel's theory could be restated, perhaps with profit, not as a theory of acting, but as a theory about the relationship of acting and intending.  The proposition that an act cannot be understood apart from its purpose implies that an act should not be separated from the actor's intention [...]  Intending and acting are bound up together; the two dimensions of the same phenomenon should not be disassociated and treated separately in the analysis of criminal liability.


127. SNYMAN, op. cit., note 113, p. 10.  Traduction de "all acts are per definitionem intentional acts".

128. Ibid.

129. Le théoricien intéressé à des exposés plus précis consultera: SNYMAN, loc. cit., note 111 et 113, et, du même auteur, "The Normative Concept of Mens Rea - A New Development in Germany", (1979) 28 Int. Comp. L Q. 212; JESCHECK, loc. cit., note 117.

130. Voir par exemple l'influence de Welzel sur  l'élaboration de l'erreur de droit dans P.K. RYU et H. SILVING, "Error Juris: A Comparative Study", (1957) Uni. of Chicago L. Rev. 421-471.

131. Sur ces conditions, voir par exemple, H.-H. JESCHECK, "Droit pénal - Procédure Pénale" dans M. Fromont et A. Rieg (dir.), Introduction au droit allemand, tome II, Droit public - Droit pénal, Paris: Cujas, 1984, pp. 266-279.

132.  Pour expliquer sommairement ces conditions, prenons encore l'exemple de l'infraction de voies de fait simple (définit à l'art. 265 du Code criminel, voir supra, la note 101).  La condition numéro un, l'existence des faits constitutifs, serait,  par exemple, la preuve de l'emploi intentionnel de la force contre une autre personne sans son consentement; la deuxième condition, l'illicéité, consisterait en l'absence d'un moyen de défense de justification, par exemple, la légitime défense; et troisièmement la faute, consisterait en l'absence des moyens de défense décrits dans notre texte principal (des excuses selon la théorie moderne allemande).

133.  Voir G. FLETCHER, "The Right and the Reasonable", (1985) 98 Harv. L. Rev. 949-982.  Dans le livre de Fletcher, Rethinking Criminal Law, op. cit., note 10, il faut comprendre la notion de "wrongdoing" comme étant les conditions 1 et 2 accomplies et la notion "attribution" comme étant  la condition 3.

134.  JESCHECK, op. cit., note 131, p. 271.

135. Ibid.

136.  Ibid.  Je préfère dire que le blâme consiste en la formation reprochable de la volonté qui a conduit à la décision juridiquement désapprouvée.

137.  FLETCHER, op. cit., note 10, p. 438.  Selon SNYMAN, loc. cit., note 113, p. 138,  la théorie finaliste, selon une forme ou une autre, est suivie par la plupart des avocats allemands.  Il est plus juste de dire comme JESCHECK, loc. cit., note 117, p. 119, que la théorie finaliste de l'acte n'a jamais prévalu mais que le sens moderne de la mens rea allemande découle intialement de cette théorie.

138.  SNYMAN, loc. cit., note 113, fait une étude très approfondie du sujet.

139.  FLETCHER, op. cit., note 10, p. 437.  Traduction de "[...] Wittgenstein's sustained attack against the mentalist bias in philosophical psychology".

140.  Ibid.  Traduction de : "Acting intentionally is a way of acting".

141. WITTGENSTEIN, op. cit., note 10.

142. COPLESTON, op. cit., note 53, p;. 502.  Traduction de:

[...] to aim at the elimination of difficulties, perplexities, problems, which arise from our not understanding the actual use of language.
143. Philosophical Investigations, op. cit., note 10, p. 49e, paragraphe 124.  Traduction de: "Philosophy may in no way interfere with the actual use of language; it can in the end only describe it."  Cité dans COPLESTON, op. cit., note 53, p. 501.

144.  FLETCHER, op. cit., note 10, p. 437.  Traduction de:

Perceiving that others are acting and intending is implicit in a way of life in which we are all reared.  To learn the language of "intending" is to learn when the circumstances warrant saying that someone intended to hit another rather than to say that the contact was accidental or absent-minded.


145.  DUFF, loc. cit., note 22, p. 101.  Traduction de:

In other cases there is [...] more room for doubt about an agent's intentions, and we might naturally talk of inferring his intentions from the available evidence, and of the chance that our inferences are mistaken.  But our inferences are neither from "colourless behaviour" nor to private mental processes.  They are from actions, or aspects of actions, which we observe to the broader patterns of which they are part.
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